“Se régénérer du travail par le travail”. (George Enesco)
Les élèves me posent souvent cette question et comme eux, je me trouve moi-même souvent dans la situation de devoir choisir entre travailler fatiguée ou laisser tomber et remettre au lendemain, en espérant que j’aurai plus d’énergie.
“Seule la paresse fatigue le cerveau.” (Louis Pauwels)
Je vais d’emblée mettre une chose au clair : il n’est pas chose facile que de travailler quand on est fatigué.
Mais si vous devez le faire ou en avez envie, dans le souci de rester efficace alors que vous n’êtes pas dans votre meilleure forme, vous pouvez appliquer quelques-unes des stratégies que je partage avec vous ci-dessous :
Les conditions générales :
- Hydratez-vous ; et mangez aussi ! Il faut du carburant pour fonctionner, n’est-ce pas ?
- Aérez la pièce dans laquelle vous allez jouer.
- Demandez à votre entourage de respecter votre travail et de favoriser votre concentration en évitant de faire du bruit autour de vous.
- Coupez toute source de distraction tels que téléphone, ordinateur, etc…
- Veillez à ce qu’une lumière agréable crée une belle atmosphère, ni trop tamisée ni trop intense ; après chaque tranche de 20 minutes posez votre regard sur un point lointain pendant quelques secondes pour reposer vos yeux.
En pratique :
“Il n’y a pas de fatigue pour celui qui crée.” (Martin Gray)
- Ne jouez pas trop fort, votre état nerveux est plutôt sensible à cause de la fatigue. Ménagez-le en ayant soin de modeler votre sonorité en cultivant des sons doux et enveloppants, lesquels vont opérer comme une vraie séance de relaxation.
- Travaillez des passages plus courts ! Votre concentration ne peut plus se maintenir sur une longue séquence, alors segmentez par quelques mesures ce que vous jouez.
- Donnez priorité à ce qui doit être renforcé sans requérir une grande concentration. Ne choisissez qu’un passage ou deux de moyenne difficulté, que vous peaufinerez de manière à sentir que votre morceau progresse.
- Ne vous attaquez pas aux éléments les plus ardus pour la mémoire. Si vous exercez la mémorisation, choisissez des passages faciles et courts !
- Musculairement parlant, ne vous lancez pas comme une locomotive dans les morceaux les plus acrobatiques. Pour ma part, quand je suis fatiguée, je travaille lentement les passages les plus ardus afin de me les remettre dans les doigts et de vérifier que tout est sous contrôle.
- Eh bien oui ! Acceptez que la séance soit moins longue que d’ordinaire ! Sommes-nous des machines programmées ? Soyez à l’écoute de votre corps et quand il dit « Assez », n’insistez pas !
Le plus grand risque encouru, lorsqu’on joue sans réussir à se mobiliser complètement, c’est de jouer en laissant s’installer sournoisement des fautes, des imprécisions non corrigées. Cela va avoir l’effet de les installer en nous pour longtemps et nous obliger, ultérieurement, à retravailler fondamentalement pour se débarrasser de ces fautes. Et vous n’apprendriez rien en entendant qu’il est beaucoup plus difficile de se déshabituer d’une mauvaise habitude que d’apprendre d’emblée correctement.
“La fatigue ne recouvre pas les désirs, elle les révèle.” (Philippe Guéguen)
Le jeu en vaut la chandelle !
Je vous encourage fortement à aller faire la conversation avec votre instrument comme si vous parliez à un ami : avec tendresse, en étant à l’écoute. Vous verrez, vous vous sentirez réciproquement traité en ami.
La satisfaction de ressentir que vous n’avez pas perdu votre journée, que les choses sont allées de l’avant, n’a pas de prix. Il faut être résolu, persévérer… mais quelle récompense, à la fin !
Félicitations à tous ceux qui, avec courage, ne remettent pas au lendemain ce qui peut être fait le jour même !